Patrimoine,Fiscal
Démembrement de propriété
Apport de l’usufruit temporaire de parts de SCI taxé en revenus fonciers
L’apport de l’usufruit temporaire de parts de SCI à une société, en contrepartie de parts de cette dernière et d’une prime d’apport, constitue une cession à titre onéreux relevant de l’article 13,5.1° du CGI qui soumet à l'IR sa valeur en revenus fonciers, nonobstant la circonstance que l’apport n’a pas été rémunéré par des liquidités
Par délibération de son AGE du 30 novembre 2012, une société a approuvé l’apport de l’usufruit temporaire sur 3 ans de parts de SCI détenues par un contribuable pour un montant total de 152 550 €. En contrepartie de cet apport, le contribuable a reçu 15 255 parts sociales nouvelles de la société bénéficiaire à 10 € chacune et une prime d’apport de 3 030 €.
À la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration fiscale a réintégré la somme de 155 580 € aux revenus fonciers imposables du contribuable au titre de l’année 2012. En effet, conformément à l’article 13,5.1° du CGI et par dérogation aux dispositions relatives aux plus-values, le produit résultant de la première cession à titre onéreux d’un même usufruit temporaire ou, si elle est supérieure, la valeur vénale de cet usufruit temporaire est imposable au nom du cédant soumis à l’IR dans la catégorie de revenus à laquelle se rattache, au jour de la cession, le revenu procuré ou susceptible d’être procuré par le bien ou le droit sur lequel porte l’usufruit cédé. En l’espèce, l’usufruit temporaire étant relatif à des parts de SCI, le produit doit être imposé en revenus fonciers.
Le contribuable a contesté cette imposition en appel aux motifs que :
-le dispositif de l’article 13,5.1° du CGI s’applique aux « cessions à titre onéreux » mais non à l’apport d’un usufruit à terme fixe qui relève du sursis ou du report d’imposition (CGI art. 150 UB et 150-0 B ter) ;
-la loi de finances rectificative pour 2012 qui a introduit ce dispositif applicable aux opérations réalisées à compter du 14 novembre 2012 ayant été votée le 29 décembre 2012 est rétroactive, ce qui est contraire à la Constitution ;
-le dispositif de l’article 13, 5.1° du CGI est contraire au principe de neutralité fiscale posé par la Directive Fusions (Directive 90/434/CEE du Conseil du 23 juillet 1990) qui interdit toute imposition en cas d’échange de titres ;
-enfin, la valeur de l’usufruit temporaire devait être déterminée après application d’un abattement de 23 % à la valeur en pleine propriété conformément à l’article 669, II du CGI et après déduction de l'abattement pour durée de détention visé à l’article 150 VC du CGI.
Sans surprise, la Cour administrative d’appel rejette la demande du contribuable. Elle considère en effet que :
-l’apport de l’usufruit temporaire de parts de SCI à une société, en contrepartie de parts de la société bénéficiaire et d’une prime d’apport, constitue une cession à titre onéreux, nonobstant la circonstance que l’apport n’a pas été rémunéré par des liquidités ;
-le Conseil Constitutionnel, déjà saisi du moyen d’inconstitutionnalité dirigé contre la rétroactivité de la loi de finances rectificative pour 2012, a validé le dispositif de l’article 13,5.1° du CGI (C. constit., décision 2012-661 DC du 29 décembre 2012, JO du 30) ;
-l’opération d’apport ne concernant que des sociétés de droit français ne rentre pas dans le champ d’application de la Directive fusions qui concerne des sociétés de deux ou de plusieurs États membres différents ;
-le barème fiscal de l’article 669, II du CGI ne s’applique que pour le calcul des droits d’enregistrement mais non à l’IR ;
-enfin, le dispositif de l’article 13,5.1° du CGI s’appliquant par dérogation aux dispositions relatives à l’imposition des plus-values, il n’y a pas lieu d’appliquer l’abattement pour durée de détention visé à l’article 150 VC.
Pour aller plus loin :
« Impôt sur le revenu », RF 1133, § 850
CAA Bordeaux 16 juin 2022, n° 20BX02968
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