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Démembrement de propriété

Le gain issu de la prorogation d’un usufruit à durée fixe taxé en revenus catégoriels

Lorsqu’un usufruit à durée fixe s’éteint au terme fixé, la prorogation de cet usufruit, pour une nouvelle période, doit être regardée comme constituant la première cession du nouvel usufruit à durée fixe au sens de l’article 13,5 du CGI.

L’article 13,5 du CGI : la taxation d'un prix en revenus catégoriels

Depuis le 14 novembre 2012, l'article 13,5 du CGI soumet le produit de la première cession à titre onéreux d'un usufruit à durée fixe à l'impôt sur le revenu, dans la même catégorie de revenus que celle dont relèvent les fruits procurés ou susceptibles d’être procurés par le bien grevé lorsque le cédant relève de l’IR, par dérogation au régime d'imposition des plus-values (CGI art. 13,5 ; BOFiP-IR-BASE-10-10-30-06/04/2017).

Une taxation limitée à la première cession d'un même usufruit temporaire :

Seul le produit résultant de la première cession à titre onéreux d'un même usufruit temporaire est imposable dans les conditions de l'article 13,5 du CGI. Lorsque l'usufruit temporaire consenti par le contribuable s'éteint à l'arrivée du terme et que ce dernier consent un nouvel usufruit temporaire, chacune de ces cessions s'analyse comme une première cession portant sur un usufruit temporaire (BOFiP-IR-BASE-10-10-30-§ 70-06/04/2017). En revanche, en cas de cessions successives d'un même usufruit temporaire, seule la première cession est imposable dans les conditions de l'article 13,5 du CGI.

La prorogation d’un usufruit éteint constitue une première cession du nouvel usufruit à durée fixe :

Dans cette affaire, une SCI a, par acte notarié du 1er septembre 2004, cédé à la société d’exploitation un usufruit temporaire sur un ensemble immobilier pour une durée de 11 ans, soit jusqu’au 31 août 2015.

Par acte notarié du 26 août 2015, les deux sociétés sont convenues de proroger cet usufruit pour une durée supplémentaire de 6 ans à compter du 1er septembre 2015 moyennant une somme de 120 000 € constituant la contrepartie des fruits à venir.

Le gérant de la SCI s’étant placé sous le régime de droit commun d’imposition des plus-values des particuliers, l’administration fiscale a procédé à un redressement estimant que le gain issu de l’opération de « prorogation » d’usufruit temporaire réalisée en 2015 par la SCI était imposable selon le barème progressif de l’IR dans la catégorie des revenus fonciers conformément à l’article 13,5 du CGI.

Débouté en première instance de sa demande en décharge des impositions supplémentaires, le gérant fait appel.

Pour la Cour administrative d’appel :

-l’acte notarié de 2015 a fait courir l’usufruit pour une nouvelle période de 6 ans à compter du 1er septembre 2015 ;

-cet usufruit ayant été constitué à une date à laquelle l’usufruit cédé en 2004 avait pris fin et à laquelle la SCI aurait dû recouvrer la libre disposition et l’entière propriété de son bien, il constitue un nouvel usufruit ;

- il en résulte que l’opération réalisée en 2015 portant sur la première cession d’un usufruit à durée fixe entre dans le champ d’application de l’article 13,5 du CGI.

La seule circonstance que les dispositions du code civil ne s’opposent pas à la prorogation d’une cession temporaire d’usufruit à une société, sous réserve qu’elle ne dépasse pas 30 ans conformément à l’article 619 du code civil, ne saurait, eu égard à l’objectif poursuivi par le législateur de lutter efficacement contre certains schémas d’optimisation fiscale en matière d’usufruit, faire obstacle à l’application du dispositif spécial anti-abus de l’article 13,5 du CGI.

Pour aller plus loin :

« Impôt sur le revenu », RF 1143, §§ 850 et 851

CAA Nancy 9 novembre 2023, n° 21NC00702

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